Factuel a interviewé Alex Royer, doctorant en CIFRE – conventions industrielles de formation par la recherche – en contrat avec Safran Aircraft Engines. Il nous présente son parcours.
Quel est ton parcours ?
J’ai commencé mon parcours dans le supérieur à l’Ecole des pupilles de l’Air près de Grenoble en classes préparatoires. Ce lycée appartient à l’Armée de l’Air et forme principalement aux concours des Grandes Ecoles d’Officiers. J’avais, pendant mes années dans le secondaire, été piqué par le virus de l’aviation grâce au BIA puis à ma formation au Brevet de Base de pilote privé. J’avais alors pour objectif d’intégrer l’Armée en tant que personnel navigant.
Au cours de ma première année de classe préparatoire, j’ai senti que ce corps de métier ne pourrait pas me convenir. Je me suis donc réorienté vers une école d’ingénieur en « Prépas intégrée » spécialisée dans les transports (ISAT, Nevers). J’ai suivi un cursus de motoriste avec toujours cette accointance pour l’aéronautique. J’ai entamé mon stage de 5ème année chez Safran Aircraft Engines sans avoir encore en tête l’idée de poursuivre mes études par une thèse. Au fur et à mesure de mes travaux et contrairement au procédé habituel, j’ai proposé à ma tutrice un sujet qui faisait suite à mon stage. Je suis encore persuadé aujourd’hui que j’ai eu énormément de chance d’avoir rencontré une personne aussi à l’écoute car elle m’a fait confiance immédiatement et a soutenu mon projet auprès des experts Safran qui m’ont accordé un financement pour entamer ma thèse Cifre au sein du LEMTA à Nancy, dans ma région de cœur et d’origine qui plus est.
Sur quelle thématique travailles-tu ?
Mon sujet de thèse est purement numérique et a pour objectif de développer une méthodologie permettant d’améliorer la modélisation du rayonnement thermique au sein des chambres de combustion de moteurs aéronautiques à l’aide de réseaux de neurones artificiels.
Le rayonnement est le troisième mode de transfert thermique et est prédominant dans les environnements à très hautes températures. Il est donc capital de le modéliser correctement dans des organes aussi sensibles. Bien que la théorie du rayonnement soit connue et maitrisée, ces transferts restent très difficiles à modéliser dans des simulations complètes couplées et multiphysiques.
Nous espérons par cette thèse rendre sa modélisation plus précise, plus efficace et beaucoup moins couteuse en termes de ressources informatiques grâce à l’ « Intelligence Artificielle » bien que ce terme générique ne soit probablement pas le plus approprié.
Comment se déroule ta thèse entre ta présence en laboratoire et en entreprise ?
Jusqu’à présent, l’organisation de mon temps de travail a été assez simple puisque je suis à temps complet au laboratoire. Mon sujet nécessite un cadre théorique très complet et le modèle que nous développerons avec mes encadrants sera en premier lieu testé et validé sur des cas académiques. Aussi toutes les ressources dont j’ai besoin, qu’elles soient matérielles ou intellectuelles, sont disponibles au LEMTA.
Plus tard dans ma thèse, je serais amené à visiter fréquemment les locaux de Safran pour confronter mon modèle à la réalité industrielle, c’est-à-dire, à des cas complexes de chambres de combustion réelles.
Cette organisation est idéale. Elle permet réellement de suivre un processus rigoureux de validation qui a en réalité toujours cours dans les services de Recherche et Développement des grandes entreprises : une collaboration avec les laboratoires académiques puis une adaptation de la méthode aux problématiques industrielles. C’est exactement la raison d’exister d’une thèse Cifre : elle permet de former des ingénieurs de recherche spécialisés, capables de prendre des postes pivots entre le monde de la Recherche et les applications concrètes de l’industrie.
Je dois avouer que personnellement, je me sens assez éloigné des problématiques très fondamentales qu’aborde parfois la recherche académique. La Cifre me permet ainsi de rester très proche des questions industrielles tout en m’apportant les connaissances, la rigueur et le soutient d’un laboratoire d’excellence comme le LEMTA.
Est-ce tu souhaites continuer ta carrière en entreprise ?
Une thèse Cifre a en effet vocation à former des docteurs à destination de l’entreprise avant tout et je ne déroge pas à la règle. Aujourd’hui, dans des grandes entreprises comme Safran, certains postes « pivot » entre la recherche fondamentale et appliquée sont réservés à des docteurs qui connaissent ces deux environnements et qui maitrisent les codes de ces deux univers. C’est ce type de poste que je recherche et j’espère que je pourrais continuer à entretenir lors de mes prises de fonction à venir, des liens forts avec le LEMTA notamment, par la publication d’articles communs par exemple.